espace public

Faire signe dans l’espace : quelques projets …

AFFICHONS ! AFFICHONS !Ne Rougissez Pas ! , Clara Choulet, Anais Chappelet

Projet Protéiforme (récolte, signalétique à la main, affiche, atelier, tampographie).

LE GRAND JEU Gonzague Lacombe et Laure du Faÿ

Création d’outils d’expression plastique pour la conception et la réalisation in situ de fresques et marquages au sol en mode participatif.

C’EST BON SIGNE !Adeline Vieira et Mathilde Gintz

C’est bon signe !, une invitation à jouer avec les formes, s’approprier l’espace de l’école, se raconter et partager des histoires.

TRAM EXPRESSION, PLAINE COMMUNE Talking Things, Plausible Possible

Comment les habitants interprètent-ils l’arrivée de cette ligne de tram inattendue ?

AU-DELÀ DU GRAPHISME La Forge, Nous Travaillons Ensemble

Essayer d’être utile, d’enchanter pour faire bouger les lignes…

NARRATION DES LIEUX collectif Déjàdesigners

Découverte des processus de design à travers plusieurs projets in situ dans un Institut thérapeutique et pédagogique (ITEP).

résistance 1 : main basse sur la ville …

Ce jour je profite de mon droit de retrait du travail, pour nourrir ce blog d’articles et autres où apparaissent mes centres d’intérêt  ; le partage et la vie dans l’espace public, celui qui existe entre le bâti ou parfois inclus dedans, est une question fondamentale du vivre ensemble à mes yeux.

Les analyses et les réflexions développées sont, au delà d’une première étape de résistance contre la déshumanisation de nos vies, des pistes à investir de façon créatives et généreuses en ces temps  de « bonnes résolutions » pour 2020…

Bonne lecture (je reproduis intégralement l’article de USBEK ET RICA) et bon visionnage du documentaire d’Arte.

 

Main mise sur les villes, Documentaire sur la question du droit à la ville et la démocratie urbaine réalisé par Claire Laborey (2013), Arte

 

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« L’architecture du mépris a des effets sur nous tous » article Uzbek et Rica, de Vincent Edin

Dans Reprendre Place, contre une architecture du mépris (Payot, 2019) le philosophe et maître de conférences à l’université de Strasbourg Mickaël Labbé pointe les dérives d’un mouvement de privatisation de l’espace urbain qui réduit le nombre de personnes pouvant obtenir un « droit à la ville ».

 

Usbek & Rica : Le sous-titre de votre livre emploie un terme très fort, « l’architecture du mépris ». Comment du simple mobilier et des décisions urbaines peuvent-elles « mépriser » et qui sont les victimes de cet ostracisme ?

Mickaël Labbé : Cette formule n’est pas de moi, mais de Georges Pérec dans son livre Espèces d’espaces (éd. Galilée, 1974). Elle correspond aussi aux travaux du philosophe et sociologue allemand Axel Honneth, qui travaille sur la notion de reconnaissance. Ce que j’observe récemment, c’est qu’un certain design, un mobilier urbain et une production de formes urbaines agissent sur la formation d’identités individuelles et collectives. Au fond, un certain type d’architecture agit sur les identités et façonne ceux qui se sentent légitimes, ou non, à être là.

Souvent, on analyse la ville en des termes macroscopiques : les inégalités économiques, la répartition par CSP, ou encore l’injustice spatiale et juridique. Cela donne un type de vision qui n’est pas inexact, mais on passe à côté d’un mode d’action négatif des villes. Ces dernières sont obsédées par leur image, qui est leur outil de valorisation le plus important. Aussi, puisqu’elles ne peuvent ouvertement ségréger, elles signifient spatialement le mépris par une architecture excluante. Cela peut passer par du mobilier urbain, type banc à SDF, soit par de larges projets privatisés comme EuropaCity (dont l’abandon a été acté en novembre dernier par le gouvernement, ndlr) ou le réaménagement de la Gare du Nord, où on signifie aux individus que ce qui nous intéresse chez eux, c’est leur part de consommateur. Dès lors qu’ils ne peuvent l’être car ils sont insolvables, ils comprennent de facto qu’ils ne sont pas les bienvenus.

Mickaël Labbé

 

Les populations « ciblées » sont donc plus larges que les seuls SDF ou les réfugiés ?  

Le banc anti-SDF est un exemple paradigmatique. Le Camden bench, par exemple, qui a été commandé par les autorités locales (dans le quartier de Camden, à Londres) en 2012 n’est pas du tout confortable et empêche les SDF de dormir dessus. En outre, ses striures centrales font fuir les skateurs. On ne peut pas squatter, graffer, traîner dessus : en somme, ce mobilier assimile les jeunes à des groupes qui potentiellement vont faire des conneries et dégrader le mobilier. La ville devrait leur offrir un terrain d’aventures, un moyen de former des groupes, et au contraire elle rejette les jeunes.

Au fond, cette « architecture du mépris » a des effets sur nous tous, des effets complètement irrationnels : la ville est moins accueillante, moins fonctionnelle, les marginaux ne peuvent pas squatter et les familles ne peuvent même pas se poser. Ce mobilier nous oblige à être dans le mouvement perpétuel et nous empêche de nous arrêter pour former un « nous » confiant, accueillant. Évidemment, ces choix urbains ne sont pas neutres : ils reflètent un modèle social fondé sur l’évitement des conflits et la maîtrise des débordements.

Le principe du contrôle peut s’entendre dans une logique autoritariste, mais n’est-il pas injustifiable politiquement ?

Vous touchez là un grand mystère ! C’est effectivement injustifiable, insoutenable pour quasiment tous les élus. Notamment, parce que ça ne sert aucune logique : ce type de mobilier ne va régler aucun problème de précarité ou d’isolement, et pourtant il est de plus en plus présent. J’ai récemment échangé avec le directeur de l’urbanisme de Strasbourg au sujet de la place d’Austerlitz, qui a été envahi par ce type d’équipements, et je lui ai demandé qui était responsable de ça. Il m’a répondu, sans doute sincèrement, qu’il ne savait pas. Il y a une forme de déresponsabilisation et d’effet de logique folle, où la décision n’est pas assignable à quelqu’un de précis. C’est très kafkaïen ! En investiguant, on peut réussir à trouver, dans le cas de décisions très localisées, s’il s’agit d’apports publics ou privés. Mais la plupart du temps, les responsables restent non identifiés. Le néolibéralisme produit parfois des effets injustifiables pour la démocratie, qu’il n’assume pas, ce qui pose des problèmes politiques insolubles.

Une des autres causes de la réduction du « droit à la ville » pour ses habitants est liée à la hausse du tourisme, qui mène à un renversement de l’accueil avec des vagues de « tourismophobie ». À quand remonte ce phénomène et quelle ampleur prend-t-il ? 

Il n’y a pas de carbone 14 du phénomène, mais disons que cela a émergé dans des grandes villes dans les années 2000. Alors, si on reprend la question posée par le sociologue Henri Lefebvre – « Qui a droit à la ville ? » -, la part des habitants historiques décroit de façon drastique à cause de la flambée des prix du foncier. Mécaniquement, les habitants sont expulsés plus loin au profit d’espaces d’accueil de touristes, plus solvables. Or, la ville est un lieu d’usages multiples et d’abord un endroit où on habite. Quand, sous l’effet de la marchandisation et de la valorisation, on délaisse le bien commun et on pense l’urbain de façon privatisable, les habitants locaux se sentent dépossédés, en perte de reconnaissance, et se rebellent.

« Il n’y a pas seulement un « sentiment » de dépossession du droit à la ville, cette dépossession existe bel et bien »

Il ne s’agit pas de dire que les touristes sont malvenus : ça n’est ni de la xénophobie ni de l’atteinte aux touristes, mais une lutte contre le sur-tourisme et ses pratiques. On rentre dans un « eux » contre « nous » car l’issue est, mathématiquement, très inquiétante : les villes les plus attractives touristiquement perdent des habitants. Je pense à Venise, bien sûr, passée de près de 175 000 habitants dans les années 1950 à 55 000 aujourd’hui. Mais aussi Paris, qui perd 15 000 habitants par an depuis cinq ans… Il n’y a pas seulement un « sentiment » de dépossession du droit à la ville, cette dépossession existe bel et bien.

Reprendre Place, contre l’architecture du mépris, Mickaël Labbé, Ed. Payot, 2019

 

Au-delà du mobilier, vous pointez deux « dérives » urbanistiques, les gated communities et les business improvement districts. Pouvez-vous nous les présenter ?

Les « Business Improvment Districts » (BID) sont en expansion partout dans le monde. J’invite les lecteurs à taper ce sigle dans Google images pour découvrir une architecture standardisée, arasée, sans aspérité ni diversité, qui gagne malheureusement du terrain chaque jour. Sur ce sujet, une des grandes découvertes pour moi a été le magistral documentaire de Frederick Wiseman, In Jackson Heights (2015), sur la vie de ce quartier de Brooklyn transfigurée par un BID. Il s’agit de partenariats public-privé qui essaiment partout dans le monde. Les BID, comme les bancs pour SDF, sont des symptômes des nouvelles pathologies de la ville. Avec les BID, on perd ce qui fait l’essence de la ville, l’altérité. On la perd de façon non démocratique et on aboutit à l’archipélisation décrite par Jérôme Fourquet, c’est-à-dire à une ville atomisée.

Dans le cas de Jackson Heights, on a abouti à un effet d’exclusion massif des gens qui ont fait la richesse de ce quartier. Jadis, on y parlait 147 langues, il y avait des échoppes, des commerçants, des atmosphères urbaines introuvables ailleurs qui ont, justement, attiré les promoteurs. Et ceci au prix de mécanismes fondamentalement anti-démocratiques, avec des réunions publiques tenues en catimini et du consentement obtenu par défaut qui s’est soldé par des expulsions des habitants ne pouvant continuer à vivre dans le nouveau quartier.

Jackson Heights n’est donc pas un phénomène isolé. Dans Main mise sur la ville (documentaire en ligne), on voit ces mécanismes à l’œuvre partout, en premier lieu à Hambourg, en Allemagne, où des habitants sont en lutte contre un BID qui va prendre des décisions de mise en forme du quartier, très rectiligne et sécuritaire, en contradiction avec la vie historique du quartier. Ce genre d’agressions urbaines contre les habitants se retrouvent des États-Unis au Royaume Uni en passant par l’Afrique du Sud, c’est un vrai fléau.

Dans votre livre, vous dites aussi que nous ne sommes pas condamnés à subir ce mépris. Comment aller vers une architecture de la convivialité ? 

Il n’y a pas de réponse unique, mais beaucoup d’initiatives sont à l’œuvre actuellement pour contrer ces phénomènes, chez les habitants comme les architectes. Nous avons eu récemment de très beaux exemples de droit à la ville défensifs. EuropaCity, qui a reculé au point d’être annulé, c’est preuve que la mobilisation et l’argumentation peuvent prévaloir. Il y a aussi la mobilisation autour du réaménagement de la gare du Nord. En faisant de nos villes des ZAD, on peut contrecarrer l’architecture du mépris. En alertant contre le mobilier anti-SDF, on peut parvenir à le faire retirer.

D’autre part, en droit à la ville positif, du jardin partagé à la friche, des tas d’exemples d’urbanisme collectif et commun pollinisent. Les élus ne doivent pas instrumentaliser ces projets mais leur laisser une chance. Au-delà du résultat, c’est le processus de ces projets qui compte. Ils sont trop souvent utilisés de façon temporaire, pourquoi ne pas les pérenniser ? Même si c’est un peu bancal, un peu moche, un peu imparfait, il se tisse des liens, des processus sociaux très intéressants. Les gens qui sont venus dans ces lieux rentreront changés chez eux, et c’est l’essentiel. Enfin, des collectifs d’architectes, à rebours des archistars du secteur, font des choses très intéressantes pour retisser du commun. Je pense par exemple au collectif ETC, qui valorise la logique du chantier et réaménage l’espace directement avec les populations, ce qui valorise les lieux et permet aux populations de s’approprier ces espaces. Mettre en avant ce genre de démarche inclusives, c’est un choix de société. Mais c’est possible.

Photo de groupe du collectif Etc. Source : collectifetc.com

 

Pourquoi avoir placé votre épilogue sous le sceau de la tristesse à Notre-Dame-de-Paris post-incendie ? 

Parce que cet événement nous a rappelé comment l’architecture est présente dans nos vies et nos identités, comment elle nous façonne bien plus que nous n’en avons conscience. Cet incendie d’un bâtiment extraordinaire pourra peut-être nous amener à prendre davantage soin de lieux plus ordinaires et familiers qui sont les nôtres. Par ailleurs, cela m’a aussi rappelé la puissance de la réunion. Post-incendie, il n’y eut aucun antagonisme : touristes, parisiens ou provinciaux, croyants ou non, il n’y eut pas de « eux » contre « nous », mais une grande réunion autour d’un bâtiment. Et le fait que l’on débatte sans fin de la façon de reconstruire Notre-Dame-de-Paris prouve que l’architecture nous façonne, et donc qu’il faut repolitiser et resocialiser cette discipline.

 

L’espace public (part1)

Qu’est-ce que l’espace public?

L’espace public ( in Wikipedia) représente dans les sociétés humaines, en particulier urbaines, l’ensemble des espaces de passage et de rassemblement qui sont à l’usage de tous. Ils appartiennent soit à l’État (domaine public), soit à aucune entité juridique et morale de droit ou, exceptionnellement, au domaine privé.

Son évolution historique est généralement le fil conducteur selon lequel est décrite l’histoire urbaine ; l’archéologie (villes proto-historiques), la cartographie comparée des villes, les écrits théoriques ont repéré les principaux modèles dont :

  • la ville grecque, le damier romain.
  • la ville coloniale romaine, française, américaine.
  • les figures et articulations renaissance ou baroques.
  • les réseaux de boulevards dans l’urbanisation haussmannienne.
  • les tracés Beaux-Arts, Art nouveau, Art déco.
  • les évolutions techniques principalement des modes de déplacement qui voient les villes adapter leurs espaces publics au chemin de fer, au tramway ou au métro et à l’automobile.

Cette adaptation entraîne une modélisation, dont les schémas post-haussmanniens (plan de Besmne pour l’extension de Bruxelles, vers 1860 notamment), les théories modernistes (séparation des 4 fonctions urbaines, indétermination de l’espace public).

Dans les cas extrêmes des grandes villes, cette adaptation réduit l’espace public à un espace monofonctionnel et technique.

Depuis les années 1980, les réflexions sur l’espace public urbain contemporain (voir plus loin) incluent un retour du piéton dans les préoccupations urbanistiques, et donc une évolution formelle qui lui donne une dimension (au moins) symbolique prépondérante : piétonniers, « zones trente » dans le Code de la Route belge, recours aux forum ou agora dans les créations d’espaces publics (années 1980).

L’espace public urbain est aussi un champ d’action régalien : organisation générale de la ville, interventions symboliques ou monumentales, planification, équipements urbains (ponts, rues, égouts). Le terme « urbanisme » est étroitement lié à l’expression du droit régalien sur la ville et à l’exercice de la transformation de l’espace public.

Simultanément, il est « champ de libertés » beaucoup plus larges que la liberté de circuler : liberté de manifestation, de parole, d’expression, de commercer. Ce champ se définit constitutionnellement, est restreint par les corps des lois, règlements et pratiques et forme le théâtre de l’opposition au pouvoir, de la plupart des conflits politiques et sociaux (sit-in, occupations de carrefours, dérives de fêtes collectives, volontés de s’identifier, de s’approprier les espaces publics d’une ville ou d’une zone.

L’espace public constitue l’espace de vie collective de ses riverains (habitants, commerçants, artisans) et les formes locales de la vie collective le marquent de manière multiforme : l’aménagement, l’ambiance, la couleur et les décorations de la rue, les marchés, les activités économiques (vendeurs ambulants, étals) ou collectives (terrasses, jeux, processions, carnavals) préservent plus ou moins le statut social et l’anonymat de chacun, avec dans les villes une très grande variétés de situations (des ghettos homogènes aux zones les plus diversifiées).

La définition juridique ou partagée de l’espace public a beaucoup évolué dans l’espace et dans le temps, et continuera d’évoluer, dont probablement au niveau européen1

 

Des définitions et des questions et/ou premières pistes de réflexion.

Des situations et des usages alternatifs et éphémères.

Pistes :

  • L’art pour tous (article ICI).. les tricots urbainsfestival des architectures vives
  • performances urbaines (ICI) : « A travers la performance, nous cherchons à donner à vivre autrement un espace à ceux qui le fréquentent quotidiennement. Nous ne laissons pas de trace matérielle puisque notre principe n°1 est de quitter le lieu dans l’état ou nous l’avons trouvé. En revanche, une trace subsiste dans les esprits. Suite à nos « expériences », certains riverains viennent nous voir pour nous dire qu’ils ne verraient plus jamais un espace sur lequel nous sommes intervenu de la même manière! »cf collectif BIM
  • espaces publics mobiles éphémère avec L’atelier Bivouac ou ETC
  • les services urbains éphémères

 

Définition du Larousse : URBANISME et organisation urbaine

Evénements possibles :

 

quelques images (metz, bordeaux, toulouse, montauban, colomier, montréal, tokyo)